L'évopsy, d'après pourquoi les femmes des riches sont belles de Gouillou
Qui ose affirmer que ce qui plait aux femmes est chez l'homme un solide compte en banque, prend le risque de passer pour un misogyne rétrograde de la pire espèce. Cela n'empêche pourtant pas David Buss, professeur de psychologie à l'université du Texas, d'écrire que « le statut professionnel d'un homme semble être le meilleur indicateur de la beauté de la femme qu'il épousera1 ». Cette même idée est reprise par Philippe Gouillou2, psychiatre français, dans un ouvrage de vulgarisation de psychologie évolutionniste, dont voici une notice.
Qu'est ce que l'évopsy ?
La psychologie évolutionniste (ou évopsy), est, selon la définition de David Buss « une approche multidimensionnelle, qui identifie les caractéristiques historiques, de développement, de culture et de situation qui ont formé la psychologie humaine et qui l'orientent aujourd'hui3 ». Discipline nouvelle, apparue à la fin des années 1980, elle s'appuie sur la sociobiologie et est redevables des travaux de Leda Cosmides, John Tooby, Jérome Barkow (respectivement professeurs de psychologie, d'anthropologie, et de sociologie), et bien sur, de ceux de Darwin.
La redécouverte de l'importance de l'aspect génétique
L'évopsy s'ancre dans la critique du mythe de la tabula rasa de John Locke (qui considérait l'homme comme une entité malléable à volonté par le milieu), et défend l'importance de l'innée. Dans cette optique, en 2001, Lewis4 montre que parmi ces enfants interrogés qui sont nés avec un sexe indifférencié (un pénis trop petit, etc. : ils représentent 1 naissance sur 2000 environ) et qui ont été élevé comme étant du sexe opposé, à l'aide de vêtements, d'attitudes et d'hormones, aucun n'a connu une enfance gratifiante et tous ont révélé des comportement typiquement masculins alors même qu'ils n'avaient plus de testicules et étaient sous hormones féminines. En effet, la sexualisation de l'individu se déroule in utero, par des décharges hormonales.
C'est ensuite l'influence parentale qui est remise en question. Judith Harris démontre en 1995 que loin de constituer la plus grande part de l'environnement, elle est quatre fois moins importante que celle du groupe5. David Cohen, professeur de psychologie à l'université du Texas, évalue quant à lui la prééminence du génétique à 70 voire 80 %, dans un ouvrage paru quatre ans plus tard6.
Darwin et la génétique
L'évopsy tire parti du darwinisme pour l'appliquer au patrimoine génétique dont nous avons hérité. Dans la mesure où les gènes jouent un rôle en terme de comportements et d'états internes, ils influent sur la capacité de leur porteur à les transmettre en laissant plus ou moins de descendants, et sont soumis aux règles de la sélection naturelle, tout comme les variations morphologiques. « Dès lors qu'un gène permet, d'une façon ou d'une autre, de maximiser le nombre de descendants, il a plus de chances de se retrouver dans les générations futures. [...] Vu sous cet angle, certains gènes apparaissent plus efficaces que d'autres : on dit qu'ils apportent un avantage sélectif. Et, petit à petit, ils se répandent dans la population, parce que les gènes moins efficaces ont créé moins de descendants7. » Cette sélection, dont nous avons hérité un corps et des comportements les mieux adaptés à la survie de l'espèce, s'est déroulée principalement au sein d'un monde qui n'est plus le notre : si homo sapiens existe depuis 100 000 ans, nos premiers descendants primates remontent à 60 millions d'années. La pression sélective s'est ainsi opérée sur une durée 600 fois plus longue avant l'apparition de l'homme moderne que depuis celle-ci. Mais tout ceci nous éloigne un peu de ce qui relie une belle femme à un homme riche selon l'évopsy.
Le critère principal en terme de compétition sexuelle chez les femmes : la beauté
La beauté est le critère majeur chez les femmes. Selon Gouillou, « la beauté n'est pas une notion culturelle mais la publicité extérieure d'une personne sur sa capacité reproductive, c'est à dire pour la femme principalement sa position dans sa période de fécondité8 ». Si la beauté est objectivable, quelles sont ses règles ? Jurgen Schmidhber9 a d'abord confirmé, à partir de dessins, que les critères de beauté suivent des règles simples, qui sont celles que les artistes ont utilisées au cours des siècles. Selon lui, « l'image d'une femme bien notée est composée d'une géométrie fractale basée sur des rotations de carrés et des puissances de 210". D'autre études ont été menées à partir de photos. Elles ont démontré que les hommes préfèrent les femmes chez qui la féminité est la plus ostensible11. En 2001, une étude a montré que le fait de regarder une photo de belle femme active les zones du plaisir dans le cerveau des hommes jeunes, et que cela influe sur leur comportement12.
Le critère principal en terme de compétition sexuelle chez les hommes : le statut social
C'est le cas chez différentes espèces animales, et notamment chez des primates : le statut social de dominant ou de meneur du mâle (on parle d'"individu alpha") attire les femelles, qui les sollicitent pour l'accouplement. Ce fait est bien connu des éthologistes. Au cours de l'évolution, les femmes qui ont privilégié un conjoint apte à créer des enfants solides, à les éduquer et protéger ont optimisé leurs chances de transmettre leur patrimoine génétique et un tel comportement. Une étude de 1996 montre justement que les visages identifiés comme dominants ont plus de chance d'être trouvés beaux13. Quant à elles, des collégiennes américaines annoncent ne vouloir s'intéresser qu'aux 30 % d'hommes les plus riches et que tous les autres sont rejetés sur ce simple critère14. Et selon David Buss, « chaque année, les hommes que les femmes choisissent d'épouser gagnent 50 % de plus que les hommes de même âge que les femmes n'épousent pas15. ». Pretty Woman existe aussi chez les Bonobos : les femelles échangent fréquemment leur corps contre les ressources en nourriture des mâles. Troisi et Carosi16 ont aussi trouvé que chez les femelles macaques, la fréquence d'orgasme était corrélée d'abord avec l'intensité des stimulations (durée de l'acte et nombre de mouvements) et ensuite avec la situation sociale. Le fait est d'autant plus significatif que la notion d'upsuck attribue un rôle en terme de sélection naturelle à l'orgasme féminin.
Et l'Amour dans tout ça ?
L'amour n'est pas absent de l'horizon de recherche de l'évopsy. Plusieurs notions y renvoient. D'abord celle de copycat, qui souligne l'importance que joue l'imitation. L'idée n'est pas nouvelle, c'est celle que René Girard a déjà développé dans mensonge romantique et vérité romanesque, et qui souligne qu'on désire ce qui est désiré.
La notion de limerence recouvre la période qu'on appelle "passion amoureuse", qui est vécue au début de la relation. Pour Cynthia Hazan17 la date butoir de cette période est de 30 mois18. Elle correspond à la chute de la concentration en dopamine, phényléthylamine et ocytocine dans le cerveau à ce moment là. Selon elle, « grâce à l'intensité et à la vision tunnel de l'engouement amoureux, nous jouissons de l'illusion que nous choisissons notre partenaire. La réalité est connue des gardiens de Zoo – le moyen le plus certain d'obtenir de membres de n'importe quelle espèce de s'accoupler est de les mettre dans la même cage. »
Certes, l'evopsy, comme toute science nouvelle, est encore tâtonnante. Mais Pourquoi les femmes des riches sont belles, l'ouvrage de Philippe Gouillou, est déjà riche de perspectives passionnantes pour accéder à une meilleure compréhension des êtres humains.
1. David Buss, les stratégies de l'amour, Paris, 1994 p.74
2Philippe Gouillou, Pourquoi les femmes des riches sont belles, Bruxelles, 2003
3. David Buss, les stratégies de l'amour, Paris, 1994 p.20
4. Ricki Lewis « Reevaluating Sex Reassignment », the scientist, 2001
5. Judith Rich Harris, « Where is the child's environment ? », psychological review
6. David B. Cohen, Stranger in the nest, New-York 1999
7Philippe Gouillou, pourquoi les femmes des riches sont belles, Bruxelles, 2003, p.60
8Philippe Gouillou, pourquoi les femmes des riches sont belles, Bruxelle, 2003, p.22
9 directeur d'études à l'ISDIA en Suisse
10 Schmidhber, facial beauty and fractal Geometry, 1998
11. Penton-Voak et Perrett, effects of exagerated feminity and masculinity on facial attractiveness, 1999
12. Aharon, beautiful faces have variable reward value, 2001
13. Mazur et Mueller, "facial dominance", research in biopolitic, 1996
14 Kenrick, Evolution, traits, and the stages of human courtship : qualifying the parental investment model, 1990
15 David Buss, les stratégies de l'amour, Paris, 1994
16 Troisi et Carosi « female orgasm rate increases with male dominance in Japanese macaques », animal behavior,1998
17 Cynthia Hazan : a tough year for monogamy, interview par Environnmental News Network, 1999
18 période qui a également été avancée par Dorothy Tennov dans love and limerence en 1977